San-Nom : Saint-Augustin

Dans ce monde de brutes où il n’y a que la 23ème rediffusion de “La petite maison dans la prairie” qui m’apaise, je ne m’attendais pas à chroniquer un projet comme celui de San-Nom. A première vue, cet album semble plutôt classieux, presque parisien. La pochette nous nargue avec un éphèbe effronté qui pourrait être tiré d’une pub de fringue chic prenant un bain… le tout intitulé « Saint Augustin ».

Son regard dans le vide laisse penser que la pochette fait la promotion du dilettantisme,  le « Je m’en foutisme » moderne ! A mieux y regarder, tout est dans le contraste : la baignoire est pleine de bières de mauvaise qualité et les titres des chansons sont plutôt provoquants !

Dissipons immédiatement tout malentendu : San-Nom veut choquer ! Il distille une musique gueularde, voyante, violente, et vulgaire… C’est un “brun” vendeur avec une belle pochette de disque, non ? Rajoutez y des protagonistes qui mettent en scène un chaos exubérant sous prétexte d’être tendance musicalement et vous seriez tentés d’acheter l’album… On les imagine bien tatoués, les dents en or, à sauter par-dessus des murets et à gueuler, le tout dans un clip « fait maison » … Tout l’inverse de la pochette en somme.

Voilà ce que tout bon père de famille dirait de ce projet musical. Mais la société a bien évolué depuis le temps où l’on me forçait à mettre des pantalons en velours côtelés et des sous-pull Jacquard. La liberté d’expression, la vitesse de réponse, la pornographie sous entendue, les punchlines et les grognements réfléchis sont devenus des atouts. SAN-NOM est de cette vague, celle qui met en scène la violence urbaine avec les moyens du bord, à grand coups de phrases chocs. Une violence qu’ils voient, qu’ils ressentent et qu’ils vivent.

On sent le Hip Hop Hardcore du siècle d’avant, le DIY (Do it yourself), la rage, les yeux fermés avec cette beauté du beat. Car il est vrai, chez ces enfants là, dans cette production vocodée hexagonale qui déferle sur les radios actuellement, c’est bien différent : ça déménage ! C’est brut, conçu avec une très belle énergie. De la fureur même, car il en faut pour déballer tout ce qu’ils déclament. Les synthés grime sont grinçants, dubstep à souhait et on en redemande.

Viendra aussi la petite pause avec le morceau « 10m² », qui traite de l’ascenseur social en panne et du mal de vivre moderne, avec une écriture sans concession et une meilleure maitrise du tempo que sur le reste de l’opus. Comme quoi San-Nom sait aussi s’asseoir pour faire passer un message…

Un mal de vivre qui se ressent dans l’exécution, mais aussi entre les lignes de cet album, un message, qui a certainement pour nom celui de l’album : « Saint Augustin ». Est-ce le nom d’une rue, d’un quartier parisien huppé ou d’une sommité qui, du haut de son immeuble haussmannien, ne regarderait plus les petites fourmis que nous sommes, écrasées par le poids de la vie, en bas de l’échelle ?

On ne sort pas indemne de cet album, on subit, on lutte, on survit… mais tel est le message de SAN-NOM : « Survivons ! »

Dove M.L.E.H.

//Ecouter l’album//

 

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